La restructuration des branches professionnelles

Le chantier de la restructuration des branches poursuit trois objectifs :
 remédier à l’éparpillement conventionnel dans un but de lisibilité et d’effectivité du droit, en constituant notamment un socle conventionnel pour les petites et moyennes entreprises majoritairement non couvertes par des accords d’entreprises ;
 dynamiser la négociation collective de branche par le renforcement de ses acteurs ;
 mutualiser les moyens des branches pour qu’elles soient à même de remplir leurs différentes missions (définition des conditions d’emploi et de travail des salariés, régulation de la concurrence, formation professionnelle).

 

Les sources du droit du travail en vidéo (Web série droit du travail)

Les ordonnances Macron de 2017 modifient sensiblement l’architecture des sources du droit du travail. Est-ce à dire que le principe longtemps retenu de la hiérarchie des normes n’a plus de sens aujourd’hui ? C’est ce que nous allons voir.

Bonjour, je m’appelle Honorine et aujourd’hui je vais vous présenter les sources du droit du travail, un épisode d’une série consacrée au droit du travail.

Les sources juridiques du droit du travail présentent plusieurs originalités par rapport à d’autres branches du droit. D’abord, on constate que les sources que certains auteurs qualifient de sources « imposées » occupent une place importante dans les rapports de travail. Ensuite, contrairement à d’autres branches du droit, l’originalité des sources du droit du travail réside dans l’importante présence de sources non étatiques des relations de travail. Et donc, à côté des lois et des règlements, le droit du travail va être complété par des règles négociées au niveau de l’entreprise ou de la branche professionnelle ou encore au niveau interprofessionnel.

Tout d’abord, parmi les sources imposées, on retrouve les recommandations et conventions de l’OIT, organisation internationale du travail, qui s’intéresse aux questions de droit du travail on peut citer par exemple, la convention n° 190 de 2019 sur la violence et le harcèlement, que la France vient de ratifier. Le Conseil de l’Europe, quant à lui, a adopté deux grands textes. Tout d’abord la convention européenne des droits de l’Homme de 1950, qui pose notamment l’interdiction du travail forcé et le principe de liberté syndicale. En outre, d’autres droits fondamentaux proclamés par ce texte peuvent avoir une incidence en droit du travail comme le droit au respect de la vie privée ou encore la liberté d’expression.

Puis, le Conseil de l’Europe a adopté en 1961 la charte sociale européenne, qui contient notamment des règles relatives aux conditions de travail, à l’emploi, ou encore au droit de grève… L’Union Européenne a également adopté de nombreux textes susceptibles de s’appliquer en droit du travail tels que les traités, règlements ou bien encore les directives de l’Union Européenne.

Nous verrons, par exemple, dans l’épisode consacré à la prévention des risques professionnels, l’importance des directives sur la santé et la sécurité au travail. Parmi les sources imposées, se trouvent également des sources nationales telles que le bloc de constitutionnalité. On y trouve le préambule de la Constitution de 1946, qui consacre de nombreux droits fondamentaux applicables en droit du travail. Ainsi la proclamation du droit de grève, de la liberté syndicale ou bien encore du droit à une formation professionnelle.

Parmi les sources nationales, il faut, bien évidemment, citer la loi et le règlement. En effet, l’article 34 de la Constitution prévoit que la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. En outre, le pouvoir réglementaire peut intervenir par décrets en Conseil d’Etat ou par décrets simples. Le code du travail comprend ainsi une partie législative, les fameux articles précédés d’un L et une partie réglementaire où les numéros d’articles sont précédés d’un R ou d’un D. Ce code n’est pas le seul support des dispositions applicables aux rapports de travail.

Ces rapports peuvent être soumis à des règles issues du code civil, du code de commerce, du code pénal ou bien encore du code de l’entrée et du séjour des étrangers. Il peut également y avoir des règles fixées par arrêté ministériel, comme par exemple, le modèle de l’avis d’inaptitude. Le Gouvernement peut aussi intervenir par le biais d’ordonnances. Pour cela, le Parlement va autoriser le Gouvernement à agir dans l’une des matières relevant de l’article 34 de la Constitution. Tel est le cas pour les ordonnances Macron du 22 septembre 2017.

Enfin s’agissant des sources imposées, l’employeur a également le pouvoir d’édicter des règles générales et permanentes via le règlement intérieur, il a ainsi un pouvoir normatif. Selon la Cour de cassation, le règlement intérieur est ainsi un « acte réglementaire de droit privé ». Son contenu est déterminé aux articles L. 1321-1 et suivants du code du travail. Le mouvement de contractualisation que connait actuellement le droit du travail donne une place de plus en plus importante à la négociation de règles. Les conventions collectives et les accords collectifs de branche sont ainsi des textes écrits négociés et conclus entre les organisations syndicales représentatives de salariés d’une part et les organisations syndicales d’employeurs d’autre part.

Par exemple, la convention collective qui concerne le plus grand nombre de salariés en France est celle de la métallurgie qui couvre 1,6 million de salariés. Une convention collective peut, par exemple, prévoir le versement de certaines primes et d’autres avantages profitables aux salariés. Conventions et accords collectifs sont soumis au même régime juridique, toutefois, la convention collective a un contenu plus large que l’accord collectif, elle est plus générale. Elle a vocation à porter sur l’ensemble des conditions de travail : durée du travail, licenciement, protection sociale, etc. tandis que l’accord collectif, lui, est plus précis, il va venir éclairer un ou des points particuliers.

Par exemple, un accord collectif peut permettre de réorganiser le temps de travail des salariés. Les conventions ou accords peuvent être conclus à différents niveaux. Ils peuvent être négociés au niveau interprofessionnel, qui concerne plusieurs secteurs d’activités, au niveau de la branche professionnelle, au niveau de l’entreprise ou encore au niveau de l’établissement. Bien évidemment, la question du champ d’application de l’accord est traitée en début de négociation par les participants.

Pour illustrer notre sujet, je vous propose maintenant un zoom sur l’articulation des sources conventionnelles. L’ordonnance du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective a révisé l’articulation entre les différents niveaux conventionnels. Désormais, le code du travail attribue précisément les thèmes de négociation aux différents niveaux. La primauté de l’accord d’entreprise devient la règle et celle de l’accord de branche, l’exception. Le code du travail liste ainsi les matières dans lesquelles l’accord de branche soit a une compétence exclusive, soit prime sur les accords d’entreprise, soit enfin peut primer sur les accords d’entreprise. Parmi les domaines de compétence exclusive de la branche, nous pouvons citer, par exemple, les dispositions relatives au contrat à durée déterminée, par exemple sur la durée du travail totale du contrat ou le nombre maximal de renouvellements possibles.

À l’inverse, les matières pour lesquelles un accord d’entreprise peut intervenir mais pour lesquelles l’accord de branche prime sont notamment les salaires, les classifications, la fixation d’une durée du travail sur une période supérieure à la semaine…

Pour finir, les matières pour lesquelles la branche peut primer si elle le prévoit expressément sont notamment la prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels ou les primes pour travaux dangereux ou insalubres. Le contrat de travail est également une source qui régit les rapports de travail. Il est marqué par la subordination juridique, que nous verrons dans un autre épisode. L’inégalité entre les contractants est d’ailleurs l’un des critères de qualification du contrat de travail.

Pour conclure mentionnons les usages d’entreprise, qui sont une source majeure des droits et obligations des parties aux rapports de travail, que certains qualifient de sources spontanées. Les usages les plus fréquents portent sur des primes et des jours de congés supplémentaires. Attention cependant. Pour qu’un usage lie l’employeur, la pratique doit remplir trois conditions : être générale, constante et fixe. De manière très simplifiée, l’usage doit être général, c’est-à-dire accordé à tous les salariés ou au moins à une catégorie de salariés. Il doit aussi être constant, c’est-à-dire attribué régulièrement. Enfin, il doit être fixe, c’est-à-dire ne pas dépendre de la volonté discrétionnaire de l’employeur.

Nous arrivons au terme de cette vidéo. Il y a donc trois points à retenir. Premier point : les sources du droit du travail sont très diversifiées. Ensuite, les sources, comme nous l’avons vu avec la pyramide, restent hiérarchisées. Enfin, en dehors des matières confiées par le code du travail à la branche, l’accord d’entreprise prime.

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À très bientôt pour un nouvel épisode consacré au droit du travail.

 

En 2015, le ministère du Travail recensait près de 700 conventions collectives (sans compter les quelques 240 conventions collectives relevant du secteur agricole), caractérisées par une grande hétérogénéité en termes de :
 couverture territoriale (branches nationales, départementales voire infra départementales) ;
 nombre de salariés couverts (moins de 200 branches de plus de 15 000 salariés, 374 de moins de 5 000 salariés) ;
 vitalité conventionnelle, laquelle est étroitement corrélée à la taille de la branche (35 % des branches n’avaient pas déposé d’accord depuis dix ans ; 95 % des branches sans négociation depuis quinze ans avaient moins de 5 000 salariés alors que 97 % des branches de plus de 10 000 salariés ont une activité conventionnelle régulière).

Or, les missions confiées aux branches n’ont cessé d’être recentrées et renforcées au fil des législations. Les lois no 2004-391 du 4 mai 2004, no 2008-789 du 20 août 2008 et no 2016-1088 du 8 août 2016, ainsi que l’ordonnance no 2017-1385 du 22 septembre 2017, ont élargi le périmètre de la négociation collective par un double mouvement consistant, à la fois, en une délégation de compétence de la loi à la négociation collective (notamment de branche) et en une décentralisation de la négociation collective vers l’entreprise.

Pour sa part, la branche s’est vue confortée dans sa mission de régulation de la concurrence (limitation du dumping social) et d’anticipation des mutations économiques, via la formation professionnelle et la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. La loi no 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a ainsi placé la branche au cœur du dispositif de la formation professionnelle en renforçant ses compétences en la matière.

La réforme de la restructuration des branches s’est traduite dans la loi dès 2014 (loi no 2014-288 du 5 mars 2014), mais le cadre légal actuel est issu de la loi no 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

Ce cadre porte sur la fusion des champs d’application de conventions collectives (qu’elle soit administrative et volontaire). La restructuration des branches peut cependant prendre d’autres formes (cf. infra).

La loi du 8 août 2016 a fixé un objectif de 200 branches à atteindre en trois ans. Le législateur a souhaité laisser l’initiative aux partenaires sociaux des branches eux-mêmes pour parvenir à cet objectif, mais a néanmoins prévu, à titre supplétif, un dispositif de fusion administrative.

La fusion administrative des champs d’application de conventions collectives

L’article L. 2261-32 du code du travail donne pouvoir au ministre du travail, eu égard à l’intérêt général attaché à la restructuration des branches professionnelles, de fusionner par arrêté le champ d’application d’une branche avec celui d’une autre branche qui présente des conditions sociales et économiques analogues. Les branches dont le champ d’application est susceptible d’être ainsi rattaché à celui de cette autre branche (dite « branche de rattachement ») sont celles qui remplissent l’un des six critères suivants (alternatifs) :

• faiblesse des effectifs salariés (moins de 5 000 salariés) ;
• faiblesse de l’activité conventionnelle (en termes de nombre d’accords collectifs signés et de thèmes de négociations couverts) ;
• champ d’application géographique uniquement régional ou local ;
• légitimité des organisations professionnelles d’employeurs participant aux négociations (moins de 5 % des entreprises de la branche adhèrent à une organisation professionnelle représentative des employeurs) ;
• absence de mise en place ou de réunion de la commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation ;
• incapacité de la branche à remplir la plénitude de ses compétences en matière de formation professionnelle.

Dans sa décision no 2019-816 QPC du 29 novembre 2019 prise à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a considéré que la réforme de la restructuration des branches poursuivait un objectif d’intérêt général et pouvait à ce titre justifier le recours à la fusion administrative. En revanche, la possibilité initialement prévue par l’article L. 2261-32 d’une fusion de champ d’application par arrêté dans le but de renforcer la cohérence des champs a été invalidée, le Conseil constitutionnel estimant que la rédaction de ces dispositions n’était pas assez précise.

Dans le cadre d’une fusion par arrêté, le ministre ne décide pas unilatéralement du choix de la branche de rattachement. D’abord, l’initiative est laissée aux partenaires sociaux de la branche concernée. Ensuite, le projet de fusion proposé par l’administration fait l’objet d’une large concertation avec les partenaires sociaux du niveau national interprofessionnel, réunis au sein de la sous-commission de la restructuration des branches professionnelles (SCRBP), issue de la commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP). Les membres de la SCRBP peuvent s’opposer au projet de fusion et formuler une contre-proposition de rattachement. Si l’administration souhaite néanmoins maintenir son choix initial de branche de rattachement, elle doit à nouveau réunir la sous-commission.
En outre, la procédure débute par la publication au journal officiel d’un avis de fusion invitant toute personne ou organisation intéressée à faire connaître ses observations sur le projet de fusion dans un délai de 15 jours, ce qui permet aux organisations n’adhérant à aucune des organisations membres de la CNNCEFP de faire part de leurs observations en amont afin qu’elles soient prises en compte.

À ce jour, la procédure de fusion administrative n’a été utilisée par le ministre que pour restructurer les branches répondant à l’un des trois premiers critères et en l’absence de projet de fusion volontaire par accord collectif.

Après la fusion des champs d’application des conventions collectives : un délai de cinq ans pour fusionner les conventions elles-mêmes

Qu’elle résulte d’un accord collectif de fusion des champs ou d’un arrêté ministériel, la fusion des champs conventionnels de deux ou plusieurs conventions collectives n’est que le point de départ du processus de restructuration.
Le code du travail laisse en effet aux partenaires sociaux des branches concernées un délai de cinq ans pour harmoniser leur corpus conventionnel respectif (convention collectives, annexes et autres accords thématiques). Plus précisément, les partenaires sociaux doivent remplacer, par des stipulations communes, les stipulations des branches fusionnées « qui régissent des situations équivalentes » (article L. 2261-33). En effet, les stipulations qui régissent des situations spécifiques à une branche peuvent, quant à elles, subsister, leur spécificité pouvant justifier qu’elles conservent leur place dans le futur corpus conventionnel commun qui régira l’ensemble des employeurs et des salariés de la nouvelle branche issue de la fusion, au terme du délai de cinq ans.

Dans l’attente de l’aboutissement des négociations d’harmonisation et pendant ce délai maximal de cinq ans, les stipulations des conventions collectives fusionnées continuent de s’appliquer chacune dans leur champ d’origine, sans que le principe d’égalité de traitement ne puisse être invoqué (article L. 2261-33). Ainsi, pendant cette période, même si les branches A et B ont fusionné leur champ d’application et ne forment désormais qu’une seule et unique branche AB, un salarié de l’ancienne branche A ne peut pas invoquer le bénéfice d’une stipulation qui existe dans la convention collective de l’ancienne branche B.

Le principe d’égalité de traitement recommencera cependant à s’appliquer à l’issue du délai d’harmonisation, l’ensemble des salariés de la nouvelle branche fusionnée ayant vocation, par définition, à être couverts par un seule et même corpus conventionnel.

Que se passe-t-il au terme du délai de cinq ans si les négociations d’harmonisation n’aboutissent pas ?

Au terme du délai de cinq, à défaut d’un accord de remplacement des stipulations des anciennes conventions collectives par des stipulations communes, les stipulations de la convention de la branche rattachée cessent de s’appliquer et l’ensemble des salariés et des employeurs de cette ancienne branche sont désormais couverts par la convention collective de la branche de rattachement.

Il existe une exception à cette règle d’extinction des stipulations conventionnelles de la branche rattachée, précisée par le Conseil constitutionnel (cf. décision précitée) : si les stipulations de la convention collective de la branche rattachée régissent des situations spécifiques à cette ancienne branche, elles continueront de s’appliquer au-delà des cinq ans.

L’enjeu de ce maintien est d’éviter tout vide juridique pour les salariés ou employeurs placés dans ces situations spécifiques qui ne sont pas régies par la convention de la branche de rattachement.

Une table des négociations recomposée après la fusion des champs d’application des conventions collectives

Les règles de participation à la négociation collective pendant la période d’harmonisation ne sont pas les mêmes selon que l’on se situe avant ou après la fin du cycle de représentativité syndicale et patronale au cours duquel la fusion des champs a lieu.

En effet, la durée du cycle de la représentativité étant de quatre ans, elle est moins longue que le délai maximal d’harmonisation des conventions collectives fusionnées (et de survie de leurs stipulations dans l’attente de cette harmonisation). Ce dernier peut donc s’étaler sur deux cycles.

Il importe donc de distinguer deux périodes :

 Jusqu’à la fin du cycle de représentativité syndicale et patronale en cours

À compter de la fusion des champs, toutes les organisations syndicales de salariés et d’employeurs qui étaient représentatives dans les anciennes branches participent aux négociations dans le champ de la nouvelle branche issue de la fusion. Leur audience respective sur ce nouveau champ est recalculée par les services de la Direction générale du travail. À titre dérogatoire, les organisations représentatives dans les anciens champs le demeurent dans le nouveau champ (et sont donc admises à négocier les accords), quand bien même leur nouveau taux serait inférieur à 8% (consultez la rubrique sur la représentativité syndicale et patronale).

La validité de tout nouvel accord collectif négocié dans le champ de la nouvelle branche est appréciée à partir de ces nouveaux taux (capacité de signature et d’opposition à l’entrée en vigueur de l’accord pour les organisations syndicales ; capacité d’opposition à l’extension de l’accord pour les organisations d’employeurs).

Cette règle s’applique quel que soit l’objet de l’accord, c’est à dire qu’il porte sur la future convention collective commune et concerne donc l’ensemble des salariés et employeurs de la nouvelle branche (négociations d’harmonisation) ou bien qu’il ne concerne que les salariés et employeurs d’une des anciennes branches fusionnées.

En effet, dans la mesure où les stipulations des conventions fusionnées (ainsi que de leurs avenants et des accords annexes) sont temporairement maintenues pendant le délai d’harmonisation, et bien qu’elles aient vocation à se fondre dans un texte commun au terme de ce délai, elles peuvent être amenées à évoluer (ne serait-ce qu’au titre de la négociation obligatoire). Cependant, même si accords ne concerneront que les salariés et employeurs d’un des champs fusionnés, c’est bien l’ensemble des organisations syndicales et patronales représentatives dans les anciennes branches fusionnées qui participent aux négociations – y compris, donc, les organisations qui étaient représentatives dans le champ non concerné par le texte négocié.

 À compter du prochain cycle de représentativité syndicale et patronale
À compter du nouveau cycle, les règles de participation aux négociations changent et le droit commun s’applique de nouveau : seules les organisations syndicales et d’employeurs reconnues représentatives sur le champ de la nouvelle grande branche sont admises à négocier.

Ainsi, les organisations qui ont perdu leur représentativité ne peuvent plus participer aux négociations, quand bien même l’accord négocié porterait sur l’un des anciens champs fusionnés au sein duquel elles étaient auparavant seules représentatives.

Le Conseil constitutionnel a cependant admis, s’agissant exclusivement des négociations d’harmonisation, et à condition que celles-ci aient débuté avant la fin du cycle précédent, que les organisations ayant perdu leur représentativité puissent continuer à participer aux discussions. Il ne s’agit cependant pas d’une participation aux négociations, ce qui signifie que l’organisation qui n’est plus représentative ne peut pas signer d’accord d’harmonisation, ni s’opposer à sa signature ou à son extension.

Les autres formes de la restructuration des branches

Le cadre juridique posé par le code du travail concerne le dispositif de fusion des champs de conventions collectives, mais la restructuration peut prendre d’autre formes, tant à l’initiative des partenaires sociaux que de l’administration.

La négociation directe d’une nouvelle convention collective

Certaines branches ont fait le choix de ne pas procéder en deux temps (négociation d’un accord de fusion des champs puis négociation pendant cinq ans de la future convention collective), mais de négocier directement une nouvelle convention collective dont le champ couvre celui de leurs périmètres respectifs. Dans cette hypothèse-là, une fois signée, la nouvelle convention collective est directement déposée et annule et remplace les anciennes.

L’élargissement de champ de la convention collective

Certaines branches se sont restructurées en élargissant le champ d’application de leur convention collective à des secteurs ou des territoires jusqu’alors en vide conventionnel. Ces élargissements leur ont permis de ne plus relever d’un critère autorisant une fusion administrative (critère du caractère local du champ d’application ou critère de la faiblesse des effectifs).

À noter que le Code du travail autorise également le ministre du Travail à élargir le champ d’une convention collective par voie d’arrêté (article L. 2261-32 II.). Depuis le début du chantier de la restructuration, le ministre n’a eu recours qu’une seule fois à ce dispositif.

La suppression d’IDCC

Au début du chantier de la restructuration, il a été constaté qu’un nombre important de conventions collectives se trouvaient en situation d’absence de vie conventionnelle (absence d’accords signés et de négociations), pour certaines depuis plusieurs décennies.

En concertation avec la sous-commission de la restructuration des branches professionnelles (SCRBP) et après examen de ces textes il a été décidé de les déréférencer en tant que conventions collectives, en supprimant leur identifiant de convention collective (IDCC). Cette pratique s’est fondée sur les trois constats suivants :
 dans de nombreux cas, les conventions collectives se trouvaient en réalité en situation de mise en cause, dès lors notamment que les organisations d’employeurs signataires avaient disparu ;
 dans d’autres cas, certaines conventions locales ne faisaient plus l’objet de négociation compte tenu de la conclusion postérieure d’une convention collective nationale portant sur le même champ professionnel ;
 pour un petit nombre de textes, il s’est avéré qu’un IDCC leur avait été attribué alors qu’ils ne présentaient pas les caractéristiques d’une convention collective, mais s’apparentaient à des accords d’entreprises ou à des accords professionnels.

Hormis dans le premier cas, la suppression d’IDCC a pour seule conséquence de déréférencer le texte en tant que convention collective, elle ne le supprime pas, à elle seule, de l’ordonnancement juridique, démarche qui appartient aux seuls partenaires sociaux.

Consultez l’annexe 3 du bilan de la négociation collective en 2019

Bilan du chantier de la restructuration des branches

Depuis son lancement en 2015, le chantier de la restructuration a concerné 438 branches :
 fusions administratives : 40 branches ont été rattachées par un arrêté de fusion et 26 branches de rattachement ont été désignées ;
 fusions des champs volontaires : 52 branches ont signé un accord de fusion des champs (créant 18 nouveaux champs conventionnels) ;
 négociation directe d’une convention collective : 24 branches ont signé une nouvelle convention collective (créant 7 conventions collectives unifiées) ;
 élargissement de champ : 5 branches ont élargi ou sont en train d’élargir leur champ d’application ;
 suppression d’IDCC : 179 branches ont vu leur IDCC supprimés ;
 secteur du bâtiment : 34 conventions collectives locales des ouvriers du bâtiment ont été dénoncées ;
 secteur de la métallurgie : 78 conventions collectives sont concernées par un processus de révision volontaire du dispositif conventionnel.

À la date du 31 mars 2020, on dénombre ainsi, dans le paysage conventionnel du régime général, 250 branches. Pour une trentaine d’entre elles initialement visées par une procédure de fusion administrative, les concertations se poursuivent. À l’issue de ces travaux, le régime général devrait compter 217 branches professionnelles

Pour un bilan quantitatif et qualitatif plus détaillé, consulter le bilan de la négociation collective 2019.
Vous pourrez y retrouver :
 La liste des fusions administratives
 La liste des fusions volontaires par accords de fusion des champs
 La liste des fusions volontaires par négociation directe d’une nouvelle convention collective